Festival International de Géographie de Saint Dié 2022

L’an dernier, je vous avais parlé de cet objet mal identifié par les non spécialistes qu’est la géographie et du festival international qui lui était consacré à Saint-Dié dans les Vosges.

Je m’y suis rendue à nouveau cette année pour 3 trois journées très intenses, un vrai moment de formation professionnelle et de partage d’expériences pour les géographes et enseignants en histoire et géographie.

Le thème de cette année, « les déserts »: un concept bien vaste !

Nous pensons tout d’abord bien sûr aux déserts naturels : désert brûlant de sable (erg) ou de pierres (reg), désert glacé de la haute montagne ou des régions polaires…

Mais tous ces espaces sont loin d’être littéralement désertiques car la vie y niche dans des endroits improbables et sous les formes parfois microscopiques.

Ses déserts sont, plus souvent que ce que l’on croit, traversés par des flux (nomades-éleveurs, commerçants…) et offrent aussi un abri aux trafiquants en tous genres et autres groupes armés… en effet, un désert, a priori sans couvert végétal est souvent mal et/ou peu contrôlé par les autorités étatiques des pays à faibles ressources.

Plus près de nous, dans nos pays si peu désertiques, le processus de désertification est pourtant à l’œuvre: notamment à travers le phénomène de « déprise rurale » qui touche les villages et petits bourgs les plus éloignés de nos métropoles, dans ce que les géographes appellent le « rural profond »: faute d’emploi les jeunes partent, les familles aussi qui ne trouvent pas de quoi offrir à leurs enfants des possibilités d’études équivalentes à la ville…départ des populations et départs des services publics (sans parler des commerces et autres services privés) se nourrissent l’un l’autre au point que l’on parle de « déserts médicaux ».

Ainsi les géographes dessinent-ils une « diagonale du vide » qui traverse la France des Ardennes au NE jusqu’aux Pyrénées au SO en englobant les régions les moins densément peuplées du Massif Central… À titre d’exemple, alors que la densité moyenne de la France est de 106 hah/ km2, Il n’y en a que 26 dans la Meuse, 25 dans le Cantal et 19 en Lozère…

Des régions qui n’ont jamais été très densément peuplées certes mais qui connaissent plus que les autres ce phénomène de déprise rurale et donc de vieillissement accéléré de la population.

Donc comme chaque année beaucoup de conférences très intéressantes mais plus particulièrement, l’une d’entre elles, judicieusement intitulée : « les géographes prêchent-ils dans le désert ? »

Comme je l’ai fait l’an dernier à propos de l’édition 2021 du FIG, je reviens sur le déséquilibre entre la forte visibilité de l’histoire et des historiens, notamment dans les médias, à l’inverse de la géographie, et des géographes, peu sollicités comme « experts » par ex.

Et pourtant, les raisons de recourir à la géographie pour analyser, expliquer et prévoir ne manquent pas, en ces temps d’inquiétude face à la montée des risques: pandémie, guerre en Europe, réchauffement climatique… Ces phénomènes modifient les milieux dans lesquels nous vivons et ont des implications notamment sur la répartition des hommes à la surface de la terre, à toutes les échelles : réfugiés climatiques qui fuient leurs îles du Pacifique bientôt submergées; modification du marché de l’immobilier suite aux confinements et à la pratique du télétravail (… une chance peut-être de redonner vigueur à certaines de nos campagnes?); remise en cause des frontières issues de l’ex URSS depuis l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014.

Outre une meilleure prise en compte de l’espace, des territoires, dans l’analyse et la compréhension de ces phénomènes, la géographie aide à construire des stratégies de riposte et d’adaptation face à ces mutations.

Fort heureusement, nous ne sommes pas totalement inaudibles ni snobés! Vous trouverez cidessous 2 exemples d’analyse, dans des domaines fort différents, mais tout aussi intéressantes pour comprendre ce que la géographie apporte à la compréhension du monde d’aujourd’hui et à la préparation du monde de demain.

1/article de Nice-Matin, cet automne, dont je n’ai malheureusement pas retrouvé la date :

2/comment la géographe Delphine Papin décrypte à travers les cartes le discours de Vladimir Poutine ; vidéo